Élément d'intrigue pas très convaincant.
Le métier d'auteur, c'est en grande partie une affaire d'intrigues.
Vous voulez des preuves ? En voici.
En 2016, j'ai corrigé, remanié ou réécrit bénévolement plus de 5 000 pages pour aider des auteurs autoédités à optimiser leur « bébé ». Mais la tâche est immense, et tous les auteurs confirmés de l'indésphère n'y suffiraient pas. 😭
Consternée
de rencontrer, sur Amazon ou ailleurs, tant de torchons bâclés qui pénalisent l'image de l'autoédition, et plus navrée encore de voir un
excès de fautes d'orthographe ou de syntaxe amoindrir les chances de
succès d'œuvres prometteuses, voire bourrées de
talent, j'ai commis de très nombreux billets pour supplier les
auteurs débutants (ou pas) de soigner la forme de leur prose. Voir par exemple ici, ou ici.
Il
est temps d'évoquer un autre élément décisif pour le succès
d'un livre : l'histoire elle-même, avec sa ou ses intrigues.
J'ai
parcouru récemment l'extrait Amazon d'un thriller édité. Oui, vous
avez bien lu : « édité ». Comme quoi, l'édition
n'est pas toujours à donner en exemple. Amis autoédités, rengainez vos complexes !
Un autre ouvrage de cet auteur m'était déjà passé sous
les yeux ; j'avais zappé, peu friande de cette invitation du
genre « roulons-nous gaiement dans le sang, le sperme, la
merde et tout ce qui effarouche le bourgeois » – ou parfois le fait vibrer, il est vrai, quand il lit ces choses-là bien au chaud sous sa couette.
(À
l'inverse, quiconque s'est frotté aux réalités du monde
aspire plutôt à l'évasion, à l'humour, bref à une légèreté
qui n'exclut pas la profondeur. Rappelons-nous cette formule
d'Alphonse Daudet, reprise à son compte par Alexandre Jardin :
« Il faut traiter les choses légères avec sérieux et les
choses graves et sérieuses avec légèreté ».)
PS : suite à un commentaire sur facebook, je précise ma pensée. Par "légères", je ne fais pas du tout allusion à de la romance ou des écrits "bisounours".
Exemple : Monteilhet (Néropolis, etc) traite des sujets dramatiques et même passablement gore, mais il le fait sur un ton ironique, distancié, persifleur, provocant, bref, irrésistible – et avec une étourdissante (érudite, disons-le tout net) connaissance de son sujet.
Ce qui m'exaspère, ce sont ces jeunes auteurs qui se piquent d'enfoncer le nez du lecteur dans la merde : "Tiens, regarde, ignare, la vraie vie c'est ça."
D'abord, la plupart du temps ils n'en savent rien – comme l'auteur dont il est question ici, et qui affirme avoir bourlingué, mais, vu l'innocent irréalisme de ses scènes, semble avoir seulement enchaîné les road trips d'un zoo marginal à l'autre, sans risquer sa peau autrement qu'en fumant des joints.
De plus, la réalité intéressante, ce n'est pas le sang, etc. Ce sont les raisons pour lesquelles il coule, et sur ce point, nos auteurs en barboteuse se montrent d'une insoutenable vacuité.
PS : suite à un commentaire sur facebook, je précise ma pensée. Par "légères", je ne fais pas du tout allusion à de la romance ou des écrits "bisounours".
Exemple : Monteilhet (Néropolis, etc) traite des sujets dramatiques et même passablement gore, mais il le fait sur un ton ironique, distancié, persifleur, provocant, bref, irrésistible – et avec une étourdissante (érudite, disons-le tout net) connaissance de son sujet.
Ce qui m'exaspère, ce sont ces jeunes auteurs qui se piquent d'enfoncer le nez du lecteur dans la merde : "Tiens, regarde, ignare, la vraie vie c'est ça."
D'abord, la plupart du temps ils n'en savent rien – comme l'auteur dont il est question ici, et qui affirme avoir bourlingué, mais, vu l'innocent irréalisme de ses scènes, semble avoir seulement enchaîné les road trips d'un zoo marginal à l'autre, sans risquer sa peau autrement qu'en fumant des joints.
De plus, la réalité intéressante, ce n'est pas le sang, etc. Ce sont les raisons pour lesquelles il coule, et sur ce point, nos auteurs en barboteuse se montrent d'une insoutenable vacuité.
Revenons
à nos intrigues. Alléchée par une chronique dithyrambique sur le
dernier thriller de l'auteur en question, je me suis dit que j'avais
peut-être raté une belle rencontre. Hélas, non.
Suis-je
simplement de l'espèce des littéraires réactionnaires, ceux qui
tirent à vue sur la production de nos écrivains en devenir, comme des
octogénaires paranoïaques flinguent les délinquants juvéniles ?
Je suis persuadée du contraire, mais pour en avoir le cœur net,
j'ai soumis l'extrait à ma fille – qui lit de tout et, encore postée à bonne distance de la trentaine, ne peut être qualifiée
de vieux tromblon élitiste. Verdict : « C'est nul. On
dirait de la mauvaise série télé. » 😕
Pourtant,
dans ce texte, aucune faute ne sautait aux yeux comme un canard sur
un hanneton ; le style ne cassait pas trois pattes à notre copain palmipède, mais c'est l'usage dans ce genre de littérature :
rien ne doit y freiner la course du lecteur, cavalant après l'intrigue
avec le souffle court et la boule au ventre, genre Mémé Juliette
quand Julien Lepers, avec sa mine bouleversante de gentil garçon propre sur lui, lui balançait en pleine poire ses questions existentielles – fût-ce par
tévé interposée.
C'est
là que…
Lepers
se prend la porte au profit de Samuel Étienne, le moteur cale, la mayonnaise tourne, l'arme
s'enraye et le lecteur dépité se crashe sur sa descente de lit.
Vous avez compris l'idée générale : y'a un os dans la
moulinette.
Dans
le cas susdit, manque de bol, il n'y a pas qu'un gros fémur décidé
à faire obstruction (genre, un ton narratif faussement dégagé qui pue l'artifice de bout en bout), mais aussi une belle collection d'osselets non moins
perturbateurs : des clichés à gogo, des répliques qui sonnent
faux et des combats hautement comiques sans le vouloir, tirés tout droit – ma fille avait raison – d'une
série télévisée pour machos du dimanche et ménagères en manque d'adrénaline.
D'accord,
je tape dur, alors qu'au fond, je n'ai rien contre lesdites séries et leurs admirateurs. En revanche, je suis très contrariée de voir des auteurs gâcher leur potentiel
en se laissant aller à la facilité, et des blogueurs leur rendre
le bien mauvais service de les encenser sans discernement.
Voici
donc quelques éléments de réflexion pour les perfectionnistes désireux de s'informer, voire de se remettre en question.
Qu'est-ce
qui fait qu'une intrigue tient la route ? Quelle en est la
recette ? « … Et d'abord, peux-tu affirmer qu'il en existe
une, toi qui nous donnes si volontiers de leçons ? »
m'interpellerez-vous peut-être, les poings sur les hanches.
La
réponse est oui.
Je ne vous livrerai pas de recette miracle, mais des règles de bonne conduite qui ne s'arrêtent pas à la recherche d'originalité, traitée ici.
Pas non plus de méthodes toutes faites, ces fameux moules dans lesquels l'édition industrielle coule sans vergogne ses produits de grande consommation ; seulement quelques pistes assorties de petits conseils qui, je l'espère, vous seront utiles.

En
goûtant votre manuscrit, ces précieux auxiliaires vont vous permettre de vérifier que tout baigne. Ils pourront peut-être même vous
conseiller, ou, qui sait ? vous tirer d'une impasse. En tout cas, ils
« essuieront les plâtres » avant que vous ne risquiez
votre bébé à portée de fusil des lecteurs-acheteurs. 😈
Choisissez ces bêta-lecteurs de formations culturelles et inclinations littéraires très
diversifiées : chacun verra des fautes, des défauts, des
incohérences que le reste de l'équipe n'aura pas remarquées.
Attendre
les retours vous larde d'impatiences ? Tenez bon ! Vous
n'espérez pas participer au prochain Goncourt, ni n'avez besoin de
sauter dans le train de la rentrée littéraire.
En
revanche, la bêta-lecture est une étape cruciale.
(Je
sais : « faites ce que je dis, pas ce que je fais. »
Ben oui. Lorsque, me risquant pour la première fois dans la
littérature fantastique, j'ai utilisé la case micro-édition, l'une
des vertus de mon éditeur – handicapé par une équipe minimaliste – fut de m'encourager à prendre des bêta-lecteurs. C'est grâce à
eux, et à son propre avis de lecture, qu'EELA est passé du stade de
vade-mecum pour initiés au stade de roman publiable. Aujourd'hui, ils me manquent.)
Au
cas où, malgré un racolage intensif parmi vos proches et sur votre lieu de travail, vous n'escompteriez qu'une dizaine de ventes de votre chef-d'œuvre, vous aurez peut-être l'impression de compromettre votre classement
au Top 100 Amazon en transformant certains d'entre eux en
pré-lecteurs gratuits. 😉
Là aussi, faites-vous violence : ces avis préliminaires vous éviteront sans doute des réactions moins diplomates émanant de lecteurs payants.
Là aussi, faites-vous violence : ces avis préliminaires vous éviteront sans doute des réactions moins diplomates émanant de lecteurs payants.
Rappelez-vous :
l'enjeu consiste à publier un ouvrage aussi abouti que possible et qui
séduira le plus possible son lectorat.
Le
temps perdu (raisonnablement) avant publication est TOUJOURS du temps
gagné.

• UTILISEZ DES INGRÉDIENTS DE QUALITÉ.
Ce qui exclut les clichés, lieux communs et autres expédients frelatés ou qui sentiraient trop le réchauffé. Vous n'êtes pas un gâte-sauce tricheur ou trop pressé, que diantre !
(Cette dernière expression est un hommage à La joueuse de théorbe de Patrice Salsa, un auteur qui ne mâche pas ses mots – je l'avais prié de quitter l'un de mes groupes, c'est dire – mais qui manie la langue française comme un chef, si bien que depuis lors, je l'ai invité dans un autre.)
PETIT
CONSEIL N° 1 :
Même
un athlète de haut niveau continue à s'améliorer en observant les
autres. Pour quelqu'un qui veut faire de l'écriture son métier,
c'est encore plus incontournable.
Lisez
de bons livres en abondance. Des livres qui ont des choses à vous apprendre, de préférence : riches et bien construits. Et lisez-les avec votre esprit d'analyse, en vous intéressant aux moyens mis en œuvre par leur auteur.
Laissez tomber les classiques si vous y êtes allergique (dommage, mais
c'est affaire de goûts). De remarquables romans sont parus au XXe siècle, si, si ! Et ce n'était tout de même pas la préhistoire…
Ces auteurs-là, les romancières anglo-saxonnes et les poètes de mes vertes années ont fait le plus gros de mon éducation.
Ces auteurs-là, les romancières anglo-saxonnes et les poètes de mes vertes années ont fait le plus gros de mon éducation.
Délaissez aussi les écrits « littéraires » si, à tort ou à raison, vous les jugez prétentieux, alambiqués, abscons. La
bonne littérature dite « de genre » est tout aussi fréquentable. Si vous ne
savez où en trouver la quintessence, demandez conseil à un libraire ou
bibliothécaire passionné.
(Je ne suis plus très à la page, mais il y a eu des romans de genre magnifiquement écrits. En SF/fantastique, je révère Theodore Sturgeon ; dans le polar, m'ont marquée : Hubert Monteilhet, Sébastien Japrisot, Boileau-Narcejac ; et même si cela peut sembler dater, l'épopée d'Albertine Sarrazin, délinquante tôt incarcérée, prouve avec brio que l'on peut mêler l'argot et des sujets triviaux, à une prose virtuose.)
(Je ne suis plus très à la page, mais il y a eu des romans de genre magnifiquement écrits. En SF/fantastique, je révère Theodore Sturgeon ; dans le polar, m'ont marquée : Hubert Monteilhet, Sébastien Japrisot, Boileau-Narcejac ; et même si cela peut sembler dater, l'épopée d'Albertine Sarrazin, délinquante tôt incarcérée, prouve avec brio que l'on peut mêler l'argot et des sujets triviaux, à une prose virtuose.)
Il
vaut parfois mieux, surtout quand on débute, lire avant tout des
ouvrages relevant du genre dans lequel on écrit. L'important, c'est leur
qualité. N'allez pas à la facilité, colletez-vous avec le talent,
voire le génie des autres. Cet exercice (gratuit, au contraire du
coaching ou des ateliers d'écriture) rend lucide, évite bien des
ridicules et permet de progresser vers l'excellence.
Parcourez
aussi les sites et blogs d'aide à l'écriture.
Tapez
dans votre moteur de recherche les mots « clichés »,
« lieux communs », « poncifs », « truismes »,
« tropes scénaristiques », pour découvrir les articles
consacrés à la banalité en écriture.
Vous
y trouverez une foule d'exemples à ne pas suivre et affûterez votre
clairvoyance en la matière.
• CONCOCTEZ DES SAVEURS AUTHENTIQUES…
… de celles qui réjouissent le palais et grâce auxquelles le dégustateur ravi retrouve ses souvenirs d'enfance, quand Papi lui faisait lécher la casserole, ou qu'il volait à la petite voisine un premier baiser parfumé à la fraise Tagada. 😋
… de celles qui réjouissent le palais et grâce auxquelles le dégustateur ravi retrouve ses souvenirs d'enfance, quand Papi lui faisait lécher la casserole, ou qu'il volait à la petite voisine un premier baiser parfumé à la fraise Tagada. 😋
– Vos
dialogues doivent être crédibles.
Recherchez le naturel ; ne vous contentez pas de répliques
stéréotypées ou, pire, invraisemblables.
Soyez
particulièrement attentif si vous employez de l'argot, des
grossièretés ou autres originalités : quand on sort des sentiers battus, il est facile de se tromper ou de produire un rendu artificiel.
Si
vous voulez pousser plus loin le perfectionnisme, veillez à
faire s'exprimer vos personnages dans les différents registres qui
leur conviennent. C'est du travail, mais cela en vaut la peine. Rien
n'est plus dommage qu'un livre prometteur où tout le monde s'exprime de la
même manière, au mépris des réalités.
PETIT
CONSEIL N° 2 :
Lisez
vos dialogues à voix haute devant des tiers. Choisissez des répliques isolées (si
vous lisiez des morceaux plus étendus, vos auditeurs pourraient être pris par
l'histoire et se montrer moins vigilants). Demandez-leur si cela leur
paraît sonner juste.
L'avis
des bêta-lecteurs est, là aussi, inestimable.

PETIT
CONSEIL N° 3 :
Amis
auteurs, ne vous fiez pas au cinéma et à la tévé pour vos scènes
d'action ! À de rarissimes exceptions près, il ne s'agit là
que de bidouillage.
La plupart du temps, l'action dans un film n'a rien à voir avec le réel, mais alors, rien du tout… Les malheureux qui ont vraiment cru qu'ils pourraient
sauter du haut de leur immeuble, envoyer valdinguer d'un ch'ti coup de volant
le chauffard qui leur prenait la tête, ou projeter trois sièges plus loin, d'un coup d'un seul avec leurs soixante kilos tout mouillés, le grand balèze qui leur bouchait l'écran, ont fini à l'hôpital ou à la morgue.
Si vous voulez approfondir le sujet de façon plus ludique, les vidéos de Suricate : Movies vs Life sont une amusante illustration de cette erreur fondamentale.
Bref, l'objectif au cinéma est de « faire comme si », de leurrer les spectateurs sans recourir à de nombreuses prises ni mobiliser un budget faramineux. Surtout qu'une scène réaliste est rarement spectaculaire, souvent trop longue, et toujours difficile à filmer de façon convaincante. Curieusement, du « comme si » chorégraphié avec soin fait beaucoup mieux illusion !
Moyennant quoi, le prestidigitateur, pardon : le metteur en scène, nous fourgue vite fait bien fait une interprétation très approximative, le plus cinégénique possible, et les non-initiés n'y voient que du feu.
Moyennant quoi, le prestidigitateur, pardon : le metteur en scène, nous fourgue vite fait bien fait une interprétation très approximative, le plus cinégénique possible, et les non-initiés n'y voient que du feu.
Vous
me direz que dans un thriller ou un polar, le but est le même qu'au
cinéma : emballer le spectateur à peu de frais. Telle une belle-de-nuit retroussant sa minjupe sur un bout de cuisse évocateur, l'auteur
n'aurait donc qu'à trousser une scène pas trop absurde pour que le tour soit joué, le « client » convaincu.
Oui
mais… êtes-vous prêts à recevoir des tomates pourries dans le cas contraire ?
• NE LÉSINEZ PAS SUR LE LIANT QUI VA HOMOGÉINISER LE TOUT.
En l'occurrence, nous aurons : d'une part, une tasse de maïzena – la vraisemblance générale –, d'autre part un gros jaune d'œuf – ce surcroît d'agrément et de densité qui bétonne l'ouvrage en y diffusant votre bonne connaissance du sujet.
Bien répartir et faire réduire à petit feu, le temps de prendre du recul sur l'ensemble de votre travail.
Bien répartir et faire réduire à petit feu, le temps de prendre du recul sur l'ensemble de votre travail.
– La
vraisemblance, d'abord.
Elle ne dépend pas seulement des éléments cités plus haut (absence de tropes scénaristiques éhontés, dialogues « justes », scènes réalistes). Eh non, ce serait trop facile !
Elle ne dépend pas seulement des éléments cités plus haut (absence de tropes scénaristiques éhontés, dialogues « justes », scènes réalistes). Eh non, ce serait trop facile !
Elle
dépend aussi de l'intrigue, qui, en plus d'être crédible,
doit aussi être distillée de façon subtile, logique et bien rythmée.
Rien
ne tue plus sûrement un roman qu'une intrigue bancale, mal ficelée,
avec des maladresses psychologiques à foison, des longueurs par-ci
et des passages trop évasifs par-là. A fortiori si elle est
également incohérente, bourrée de contradictions, voire d'erreurs.
Un
petit florilège ? Allons-y.

Exemples.
On
court après un assassin pendant 200 pages, et à la dernière, ô
surprise : c'était un parfait inconnu, parachuté in extremis
comme un GI sur le bocage normand en 44, pauvre homme.
Ou
bien : on ne saura jamais qui c'était, parce qu'en fait, ben ça
devait pas être tellement intéressant. En tout cas, pas pour l'auteur, qui avait des prétentions plus métaphysiques. Je vous jure, cela existe !
Le
ressort d'intrigue qui ne tient pas la route.
(Le ressort d'intrigue, c'est comme sur un piège
à souris, avec le lecteur dans le rôle de la proie.)
Exemples.
« Sigismond,
ivrogne invétéré, s'envoie dix bouteilles de vodka qui le poussent
à tuer sa voisine. » Hélas, chargé à ce point, il
n'encourt pas le passage au crime, mais seulement le coma éthylique terminal.
Ou
encore : le coupable était en réalité la cousine Martha. Hélas, un lecteur qui n'avait pas encore sombré dans le coma s'aperçoit qu'en
vérité, ça ne tient pas debout : clouée à son fauteuil
roulant, Martha n'aurait pas pu parcourir dix kilomètres à travers
bois à l'allure d'un TGV.
Le
personnage secondaire qui meurt au chapitre 3 et ressurgit au chapitre 20, probablement parce que l'auteur planifiait
sa partie de pêche, avait trop bu, était tombé dans le coma (rayez la mention inutile). Ou, pire : prend les lecteurs pour des cons 😡et se satisfait de pisser du jus de
navet à la cadence infernale de cinquante pages/jour. Mais vous,
heureusement, vous ne mangez pas de ce pain-là, sinon vous ne seriez
pas en train de me lire.
Etc,
etc.
Dans
ce domaine, je suis désolée, seule l'expérience acquise avec de
bonnes lectures peut vous guider. Agatha Christie était un maître
en la matière ; d'autres écrivains célèbres n'attendent que
votre visite pour vous délivrer leurs inappréciables enseignements.
S'il
est trop tard pour les lectures édifiantes, si votre manuscrit est déjà prêt à poster, déchirez l'enveloppe à belles dents et soumettez
d'urgence son contenu à des avis autorisés : bêta-lecteurs au regard implacable, coach qualifié, enseignant, auteur d'expérience.
Enfin,
la vraisemblance dépend également de la qualité des personnages :
si le lecteur y adhère, il collera à l'histoire comme un diptère
sur un papier tue-mouche (à cette différence près que le lecteur,
lui, doit survivre à cette expérience pour resservir 😜).
Mais
les personnages méritent un billet à part entière, aussi, nous en
reparlerons une autre fois.
– La
connaissance du sujet est indispensable.
Rappelez-vous : il s'agit de notre « jaune d'œuf » qui contribuera à épaissir la sauce. Cet œuf-là est rarement pondu en plein air – si fallait n'écrire que sur ce que l'on a vécu, ce serait moins drôle –, mais la lumière d'un écran ou d'une lampe de bureau fera très bien l'affaire.
Rappelez-vous : il s'agit de notre « jaune d'œuf » qui contribuera à épaissir la sauce. Cet œuf-là est rarement pondu en plein air – si fallait n'écrire que sur ce que l'on a vécu, ce serait moins drôle –, mais la lumière d'un écran ou d'une lampe de bureau fera très bien l'affaire.
Si
vous ne maîtrisez pas les éléments de votre histoire (époque,
décor, contexte, personnages, etc), n'espérez pas vous en tirer au bluff, en vous
présentant aux lecteurs comme un spécialiste : ça ne fonctionne pas, en
tout cas pas avec ceux qui savent, et cela finirait par vous discréditer.
Documentez-vous
plutôt avec sérieux. Internet vous facilitera grandement la tâche ; si cela se révèle insuffisant, n'hésitez pas à solliciter des experts
et à courir les bibliothèques.
Ce travail est un passage obligé, à moins que vous ne décriviez qu'un univers 100 % imaginaire.
(Et encore… Gare aux aberrations, notamment d'ordre scientifique, en SF et même en fantasy : sauf indication contraire – à exposer de façon crédible, attention ! –, les lois de la physique devront s'appliquer aussi à vos Plutoniens ou à vos Orcs.)
Vous avez peut-être choisi l'autre solution de sécurité : camper votre roman dans un contexte qui vous est familier. S'il s'agit de la vie de tous les jours, ne perdez pas de vue que, certes, les lecteurs aiment pouvoir s'identifier aux personnages, mais ils aiment aussi rêver et être dépaysés.
Dernière option, plus risquée : rester vague, ne faire qu'esquisser le décor. Ça fonctionne si l'ambiance psychologique est très réussie, mais attention à ne pas laisser au lecteur l'impression de rester sur sa faim ou d'avoir été escroqué.
(Et encore… Gare aux aberrations, notamment d'ordre scientifique, en SF et même en fantasy : sauf indication contraire – à exposer de façon crédible, attention ! –, les lois de la physique devront s'appliquer aussi à vos Plutoniens ou à vos Orcs.)
Vous avez peut-être choisi l'autre solution de sécurité : camper votre roman dans un contexte qui vous est familier. S'il s'agit de la vie de tous les jours, ne perdez pas de vue que, certes, les lecteurs aiment pouvoir s'identifier aux personnages, mais ils aiment aussi rêver et être dépaysés.
Dernière option, plus risquée : rester vague, ne faire qu'esquisser le décor. Ça fonctionne si l'ambiance psychologique est très réussie, mais attention à ne pas laisser au lecteur l'impression de rester sur sa faim ou d'avoir été escroqué.
Comme celle des lectures formatrices, l'étape de la documentation est à accomplir de préférence avant de vous lancer.
Si
vous avez déjà rédigé votre manuscrit sous le coup de l'inspiration,
prenez quand même tout le temps et donnez-vous tout le mal
nécessaires pour vérifier que vous n'avez pas écrit de monstrueuses
inepties.
Gros
bonus : vous vous apercevrez que les informations glanées en vous documentant vous
permettront d'enrichir votre histoire de détails vivants et
intéressants qui feront toute la différence. 😃
En
résumé, la littérature n'est pas du cinéma : une ambiance en trompe-l'œil n'abusera pas les lecteurs
avisés ; ils se sentiront arnaqués.
Il
n'appartient qu'à vous de « faire le métier » pour
réussir votre mitonnage (à ne pas confondre avec le « mythonage », une ragougnasse que l'on abandonne de grand cœur à ceux qui s'en contentent).
Ne vous découragez pas devant l'ampleur de
la tâche ; prenez les problèmes à bras-le-corps l'un après
l'autre, faites-vous aider, et tout ira bien.
Chers
amis auteurs, j'espère avoir pu vous rendre service avec cet aperçu
des éléments d'intrigue à soigner impérativement.
Que
les lecteurs me pardonnent : ils ne sont ni des souris, ni des
mouches, mais des interlocuteurs bien-aimés auxquels nous ne rêvons
que de complaire, dussions-nous exécuter la danse du ventre avec notre plus
belle plume fichée dans le fondement.
D'ailleurs,
ne sommes-nous pas tous des lecteurs, nous autres auteurs ?…
Excellente
écriture et lecture à toutes et à tous ! 😘
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